Si tard, il était si tard, KELMAN James

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L’HISTOIRE

Glasgow, dimanche matin, Sammy émerge de deux jours de beuverie. Il n’a plus de portefeuille et est chaussé de baskets qui ne lui appartiennent pas. Suspect, il est arrêté et sauvagement tabassé par la police. À la sortie il se découvre complètement aveugle. Les choses empirent encore : sa petite amie disparaît, la police l’interroge pour un crime mystérieux lié au terrorisme politique et le médecin qu’il finit par consulter refuse d’admettre qu’il est aveugle. Il erre dans les rues pluvieuses de Glasgow, en tentant vainement de donner un sens au cauchemar qu’est devenue sa vie.
Sammy navigue avec un curieux détachement entre ingénuité et acceptation, avec une combinaison de courage et de méfiance exprimée dans une prose torrentielle, faite de rudesse, de tension qui ne faiblit jamais. On y lit une parabole politique subtile et noire sur la lutte et la survie, riche d’ironie et d’humour noir.

BOOKER PRIZE 1994

«Un livre exceptionnellement intense et lucide.»
The Guardian

«Kelman est un écrivain drôle, acide, expansif, dont les phrases étranges, originales, sont autant de géniales aventures de la pensée.»
The New Yorker

James kelman est né en 1946 à Glasgow, où il vit encore aujourd’hui. Il quitte l’école à quinze ans, entre en apprentissage comme typographe, puis vit de petits boulots. Il a publié de nombreux romans, dont Le Poinçonneur Hines, Le Mécontentement et Faut être prudent au pays de la liberté, ainsi que des recueils de nouvelles.

MON RESSENTI

Un livre singulier qui ressemble à un long monologue. Alors que cela pourrait ennuyeux, il n’en est rien je voulais absolument savoir où l’auteur voulait m’emmener, je voulais savoir ce qui allait se passer pour Sammy cette pauvre âme qui se retrouve aveugle après deux jours de beuverie et aucun souvenir de ce qui s’est passé.

J’ai beaucoup aimé car les pensées, les difficultés rencontrées et le courage de Sammy paraissent réels et qu’il y a beaucoup d’humour noir et d’ironie. C’est une satire sociale et politique de l’Ecosse. Le phrasé est assez déroutant au début mais très vite on s’y fait.  Il n’y a pas de ponctuation, les phrases sont longues ça peut rebuter certains lecteurs mais c’est quelques choses d’assez singulier qui peut interpeller aussi.

L’histoire se tient, on s’attache à ce Sammy même si c’est pas un type très net . J’ai donc bien aimé ce livre mais pas assez pour lire les autres livres de l’auteur.

VERDICT

Ravira les adeptes d’ovnis littéraires et amateurs de longs monologues et langage familier. Un livre sympa sans plus.

EXTRAITS

« Tu te réveilles dans un coin et tu restes là en espérant que ton corps va disparaître, les pensées t’étouffent ; ces pensées ; t’as envie de te souvenir et de regarder les choses en face pourtant, mais y a quelque chose qui t’en empêche, pourquoi tu peux pas le faire ; les mots te remplissent la tête : et puis les autres mots ; y a un truc qui va pas ; y a un truc qui va vraiment vraiment pas ; t’es pas un type bien, non t’es pas un type bien. Retour progressif à la conscience, de l’endroit où t’es : là, effondré dans ce coin, avec ces pensées plein la tête. Et oh bon Dieu ce qu’il avait mal au dos ; raide, et la tête qui résonne. Il a frissonné et voûté les épaules, fermé les yeux, gratté les coins du bout des doigts ; voyant toutes sortes de points et de lumières. Mais putain où il pouvait bien…
Il était là, il était adossé contre une vieille grille rouillée, avec des pointes acérées, certaines manquantes ou cassées. Il a regardé à nouveau et vu que c’était un petit parterre de mauvaises herbes vertes, voilà sur quoi il était assis. Ses pieds étaient de retour dans son champ de vision. Il les a examinés ; il portait une vieille paire de baskets putain de merde elles venaient d’où il les avait jamais vues avant mec des putains de vieilles baskets. Les lacets étaient même pas attachés ! Où étaient ses pompes en cuir ? Des pompes en cuir toutes neuves mec il les avait achetées y a quinze jours et maintenant elles avaient disparu putain non mais t’imagines, quelqu’un avait dû les lui tirer, un misérable salopard, tu parles d’une aubaine. Et puis il lui avait refilé celles-ci. Une putain d’affaire. À moins qu’il l’ait cru mort; ça se tenait, t’imaginais bien le truc, un pauvre connard en train de se gratter la tête et de se dire, Y a personne, y a personne ; alors pourquoi pas les prendre, le type est mort, prends-les, c’est mieux que de les laisser se perdre, se désintégrer nom de dieu pourquoi pas les prendre. Sale enflure il aurait dû regarder comme il faut. Il l’avait peut-être fait ; et vu qu’il était pas mort en fait alors il s’est contenté de faire l’échange, et lui avait collé les baskets.
Fait chier. Il a secoué la tête et levé rapidement les yeux : des gens – y avait des gens ; des yeux qui regardaient. Ces yeux qui regardaient. Une luminosité terrible qui l’a obligé à protéger les siens, comme si c’était des formes divines et si la lumière qui venait d’elles était divine ou un truc comme ça mais ça devait seulement être le soleil qu’était haut derrière elles et qui se reflétait sur leurs épaules. C’était peut-être des touristes, ça pouvait être des touristes ; des gens extérieurs à la ville venus pour un gros événement commercial à la con. Et ils étaient là sur l’aimable invitation du bureau de promotion de la mairie, suivant une visite guidée faite par une belle nénette agent de publicité avec tailleur chic et lèvres écarlates affichant ce petit sourire tranquille, le voyant ici, mais obligée de rien cacher; de les emmener partout dans le cadre de son travail, ces messieurs étrangers, pour qu’ils puissent tout voir, la totale, ça faisait sans doute partie du contrat sinon ils allaient pas investir leurs deniers durement gagnés, le résultat financier mec des fois faut en tenir compte, quand t’es homme d’affaires, tu vois ce que je veux dire. Alors ok, tu joues ton rôle et tu leur fais un sourire, pour qu’ils comprennent que tu connais une vie différente de celle-ci où ce que t’es c’est tout (…) »

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