Les chagrins ont la vie dure, Catherine Laborde

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L’HISTOIRE 

Une femme se retrouve seule en compagnie d’un enfant. En fugue ? Elle décide de lui parler et de s’en occuper. Mais le veut-il ? Et elle-même, que cherche-t-elle ? Elle pense aider un enfant, mais ne serait-ce pas plutôt ce garçon qui va la pousser à s’interroger sur sa vie ? Et, le temps d’une échappée bordelaise, la replonger dans ses souvenirs pour la guérir de ses fantômes ? Dans ce roman tendre et passionnant, Catherine Laborde brosse le portrait d’êtres singuliers et marquants, de ceux qui en traversant nos vies y laissent une empreinte.

MON RESSENTI

C’est le premier livre de Catherine Laborde que je lis et je suis agréablement surprise, je me méfie toujours des « people » qui se lancent dans l’écriture. C’est un livre délicat et touchant que nous livre tout en douceur l’auteur. Dès les premières pages la magie opère, j’ai tourné les pages avec bonheur et j’ai aimé les deux personnages un tourné vers le passé et l’autre vers le futur et de la douleur et de souffrance pour les deux.

C’est sur la thématique du passé et des blessures du passé , sur les rapports entre l’enfance et le présent, la gestion du futur. J’ai beaucoup aimé le fait que l’on ai un point de vue différent en fonction des événements ce qui donne beaucoup de relief à l’histoire. Une histoire assez simple mais efficace qui fait que l’on passe un bon moment. On comprend  que le personnage principal est un double de l’auteur avec l’allusion à madame météo.

Il y a bien un écrivain derrière la présentatrice météo.

VERDICT

Une histoire émouvante, des personnages attachants, le livre parfait pour passer un petit weekend tranquille .

  • Broché: 240 pages
  • Editeur : FLAMMARION (10 février 2016)
  • Collection : FICTION FRANCAISE

EXTRAITS

Retour à Bordeaux. Non pas pour moi, ni pour tous ceux que j’ai aimés ici dans ma ville. Ils sont morts, ou ont quitté la ville, ou n’ont plus donné de leurs nouvelles. Nous nous sommes perdus de vue. Depuis plusieurs années, je ne vais plus à Bordeaux qu’en rêve. Et puis voilà, Claude est mort. Alors j’y reviens juste pour la journée, pour l’accompagner au cimetière. Un autre chapitre s’achève.

Le roulis du train, le calme qu’il fait naître, do do l’enfant do, éloignent son appréhension. Elle est dans la poussette double qu’elle partage avec sa grande soeur, et après un tour beaucoup trop long dans les rues du quartier, enfin elles rentrent à la maison. Elle s’assoupit, elle aime le roulis du landau. Sa tête et son corps se souviennent, c’est bon. Do, do, l’enfant do. Les Aubrais, Tours, Poitiers. Au début de mon installation à Paris, je repartais à Bordeaux presque toutes les semaines, et je ratais Châtellerault parce que c’était le moment précis où je m’endormais ; le train ne s’y arrêtant pas, je ne me réveillais pas. Châtellerault, exactement à mi-chemin entre Paris et Bordeaux, la gare qui délimite la frontière entre nord et sud, entre enfance et âge adulte.
Le train n’y arrive pas encore. Il va vite, pourtant. Le wagon tangue, secoue les voyageurs, des bouffées de peur les tirent par courts instants de l’engourdissement. Le ciel est devenu noir, les premières gouttes, lames d’eau horizontales et griffues, s’écrasent en biais contre la vitre, les arbres échevelés sont secoués de grands spasmes ; dehors la tempête, ici le calme et le regard scrutateur d’un enfant assis en face d’elle.

Je me rendors. Doux, doux le bercement du train. J’ouvre de nouveau un oeil, le convoi longe l’autoroute, va plus vite que les camions et les voitures, entourés de nuages d’eau. À travers la pluie, je devine des flèches en métal argenté, dressées sur le bas-côté, sculpture monumentale et ridicule de bord d’autoroute, conserve géante qu’on aurait forcée avec un immense canif. L’«oeuvre» me rappelle Claude. Claude qui décorait les murs de sa chambre avec des boîtes vides à ouverture facile ; on tirait sur une languette, et, hop, le couvercle se relevait et s’épanouissait en spirale. Il trouvait le procédé du plus bel effet. Une fois vidées de leur contenu, thon au naturel ou sardines à l’huile, les dépouilles métalliques s’accrochaient aux parois, plafond, meubles ; la poussière se collait vite à l’huile qui suintait, les reliquats devenaient des sculptures presque immatérielles, particules agglomérées sur des serpentins en fer-blanc. La première fois que nous avions fait l’amour, j’avais observé, intriguée, ces étranges spirales dont certaines étaient placées au-dessus du lit étroit. Je n’avais pas aimé, j’ai apprécié après, plus tard.

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